1976-2016, regards sur les 40 ans écoulés

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date

Novembre 2016 – Brumaire 225

Auteur

Robin Goodfellow

Version

V 1.0

 

 


 

En novembre 1976, nous éditions le premier numéro de la revue « Communisme ou Civilisation » (plus loin CouC). Celui-ci contenait un texte de 22 pages intitulé, précisément, « Communisme ou Civilisation » et 19 pages de « thèses complémentaires au n°6 d’Invariance (1969) »[1].

 

Le petit noyau qui publia cette revue (et qui, pour l’essentiel constitue encore aujourd’hui notre organe collectif Robin Goodfellow) le fit au sortir d’un passage relativement bref par le Groupe Communiste Mondial, en 1975, qu’il quitta rapidement au vu du caractère mensonger de ce groupe qui prétendait se situer dans la lignée du projet de retour à Marx d’Invariance, et qui ne faisait en réalité, dans la pire ambiance de secte, qu’ânonner des formules et des litanies, dans une caricature d’invariance du marxisme qui n’en était que la totale ossification.

Dès le premier numéro sorti, ce petit noyau prit une teneur internationale, puisque des camarades brésiliens rencontrés à Paris organisèrent, une fois de retour et encore sous la dictature des généraux, un petit cercle d’études du Capital de Marx dont une partie s’agrégea à CouC. Même à l’échelle microscopique qui est encore la nôtre aujourd’hui, le travail de restauration programmatique s’effectuait à une échelle internationale, notamment dans des pays de langue latine (Espagne, Brésil, France, puis Mexique), mais aussi en Allemagne (de l’Ouest à l’époque).

 

Par ailleurs, la date de 1976 marquait également un tournant décisif dans l’histoire de la gauche communiste dite italienne et notamment du PCI-programme communiste qui avait tout misé, sur une « crise catastrophique » prévue en 1975, laquelle devait ouvrir la perspective « guerre ou révolution ». Naturellement il n’en fut rien, et, loin d’en tirer les conclusions sur un travail nécessaire de retour théorique à l’analyse des cycles et crises en prenant appui sur les textes de Marx et Engels, le PCI s’enfonça dans sa propre crise, qui finit par donner lieu à son éclatement en 1982. De même, l’échec de la première partie de la prévision de la gauche communiste, relative à la crise d’entre-deux guerres, prévue pour 1965, avait engendré la scission de 1966 qui elle-même donna lieu à la création de deux revues distinctes (Invariance et Le fil du temps).

 

Ce milieu des années 1970, qui gardait encore l’écho (de plus en plus lointain) de la flambée de 1968, à la fois mouvement petit-bourgeois « d’émancipation » et grève ouvrière massive (la plus importante de tout le mouvement ouvrier) mais qui ne dégagea pas de forces prolétariennes autonomes, connaissait un développement relativement important de l’extrême-gauche, mais aussi, bien que ce soit à une toute petite échelle[2], d’une ultra-gauche[3], disposant d’une presse, de réseaux de militants et capable d’animer des « réunions internationales », consacrées principalement à des questions d’organisation.

 

Au sein de cette sphère qui se démarquait du gauchisme, CouC reprenait un ensemble de positions politiques que nous identifiions comme un distinguo vis-à-vis des gauchistes (trotskystes, guevaristes, maoïstes) et des anarchistes : abstentionnisme, rejet de la forme syndicale (ce qui n’était pas la position des composantes issues de la gauche communiste d’Italie), regard critique sur les luttes de libération nationale, rejet des politiques de front unique, critique du capitalisme russe, chinois, cubain, etc. De cette manière nous avions endossé une sorte de « plate-forme » politique héritée d’Invariance, et nous nous basions sur une analyse de la période qui devait privilégier en premier lieu le travail théorique et plus particulièrement pour nous, il s’agissait de fonder sur Marx et Engels, les positions politiques qui nous délimitaient.

 

En effet, nous référant à l’époque à une évaluation des cycles de crise à environ 6 ans, nous pensions qu’il y aurait une nouvelle crise en 1981, sans pour autant reconduire la prévision du PCI d’une alternative immédiate guerre ou révolution. De nouvelles crises devaient ébranler le mode de production capitaliste, aiguiser un antagonisme entre puissances impérialistes qui, dans le contexte de l’époque, se traduisait globalement par le conflit Est-Ouest et favoriser le retour du prolétariat sur la scène de l’histoire.

 

Notre programme de travail consistait donc dans la publication, avec la plus grande régularité possible (ce qui, dans l’ensemble, fut  tenu[4]), d’une revue semestrielle qui publierait des études approfondies étalées sur plusieurs numéros. Ce plan de travail avait un objectif : il s’agissait de fonder les positions politiques que nous avons rappelées sur autre chose que les bases théoriques sur lesquelles s’appuyaient les groupes « ultra-gauches » et qui étaient de deux sortes : toute une partie se basait sur l’idée que le mode de production capitaliste était entré en décadence[5]; l’autre reprenait la partition léniniste classique d’un capitalisme parvenu au stade de l’impérialisme. Dans les deux cas, y compris pour la revue Invariance, la date de 1914, qui consacrait à la fois l’éclatement de la guerre mondiale et l’effondrement de l’internationale ouvrière dans la collaboration de classes, était identifiée comme la date charnière autour de laquelle s’effectuait cette périodisation, dans l’histoire du MPC.

Pour notre part, tout en maintenant la date charnière de 1914 qui était un point commun à toutes les composantes du « milieu révolutionnaire », nous en faisions la coupure, à la suite d’Invariance[6], entre ce que nous appelions les « phase de soumission formelle » et « phase de soumission réelle » du travail au capital en nous basant sur la lecture de la traduction de Roger Dangeville du 6° chapitre (inédit) du capital de Marx, la seule disponible à l’époque[7]. Ainsi, pour nous, la césure était marquée par le passage à la « phase de soumission réelle du travail au capital ».

 

C’est à partir de ce socle théorique que nous avons tourné le dos à toutes les initiatives immédiatistes qui visaient à convoquer des « réunions internationales » dont les discussions tournaient invariablement autour de la question de « l’organisation des révolutionnaires ». Nous estimions que ce n’était pas l’heure et que le mouvement aurait mieux fait de se tourner résolument vers le travail ardu de la restauration et de la défense de la théorie révolutionnaire : le marxisme[8]. Dans cette optique, nous considérions que la critique des positions politiques de ces groupes serait plus efficace si elle ne prenait pas la forme d’une discussion immédiate sur les conséquences politiques, mais celle d’une critique de fond de leurs présupposés théoriques, et au premier chef le luxemburgisme[9], qui les animait.

 

D’où le démarrage d’une étude d’ampleur sur la théorie des crises dont la publication commença à partir du n°8 de la revue (1980) et se poursuivit jusqu’au n° 14 de la revue suivante, la RIMC. Les livres que nous avons fait paraitre en 2014 (Aux fondements des crises, le marxisme de la chaire et les crises[10]) et 2016 (Crises et cycles aux Etats-Unis depuis 1929, essai de systématisation de la conjoncture[11]) en sont le prolongement, et d’autres études sont à paraître, notamment sur la question du capital fictif.

 

Ainsi, pendant 12 années (de 1976 à 1988), CouC se consacra à ce travail systématique, ardu, de « retour à Marx », en essayant de couvrir tous les plans : la critique de l’économie politique et la question des crises, ainsi que la question agraire, l’histoire du mouvement ouvrier, la question philosophique. Beaucoup de travaux sont encore à l’état d’ébauche.

 

A partir de 1988, la revue parut en cahier dans une revue plus large appelée la « Revue Internationale du Mouvement Communiste » (RIMC) et que nous avions éditée avec quelques autres petits groupes ou collectifs, après qu’un appel ait été lancé auprès de l’ensemble des composantes du mouvement révolutionnaire. Nous disions que, tout en continuant de refuser à discuter de l’actualité politique avec ce mouvement, celui-ci souffrait d’une dispersion dommageable dans son expression générale et que s’il regroupait des moyens d’édition et surtout de diffusion, il gagnerait une meilleure visibilité de ses positions. Mais le sectarisme ambiant ne permit pas d’aller au-delà.

 

Il commença assez rapidement à apparaître que, en portant ses fruits, le projet initial de CouC du « retour à Marx », « détricotait » en même temps ce sur quoi il avait tendance à se fonder, c’est-à-dire, pour simplifier, la vulgate ultra-gauche et l’ensemble de positions qui formaient ce que le CCI[12] appelait, de son côté, les « frontières de classe », et cette critique englobait aussi pour une bonne part la gauche communiste d’Italie.

 

En effet, tout concourait à démontrer l’inanité de la coupure de 1914, non pas que le mode de production capitaliste ne connaisse pas de grands cycles de développement au cours desquels se modifient les rapports entre les classes et les rapports de force entre nations, mais dans son histoire propre, mais il était impossible de fonder cette coupure soit sur des analyses luxemburgistes ou grossmano-mattickiennes qui tournaient le dos à la théorie de Marx et dont la critique que nous en faisions démontrait l’absurdité. Qui plus est la notion de « phase » (de soumission …) avait été rajoutée par Dangeville ; elle n’existe pas dans l’original allemand. La subordination réelle du travail au capital (procès de travail, technologie, spécifiquement capitalistes : machinisme) se manifeste avec la révolution industrielle et prédomine au début du 19° siècle, dans les pays capitalistes les plus développés. Ce n’est donc pas dans le cadre d’un mode de production capitaliste « ascendant » ou dans une phase encore « progressiste » que Marx et Engels ont eu l’occasion d’élaborer et de défendre leurs positions politiques et stratégiques au sein du parti communiste, mais bien dans une période de capitalisme moderne, au sein d’un mode de production capitaliste déjà affirmé, développé et bien implanté, même si cela était limité, pour l’essentiel, à l’aire géographique européenne.

 

Tous les arguments qui consistaient à renvoyer les positions de Marx et Engels sur les révolutions bourgeoises, sur les syndicats, sur l’usage du parlementarisme aux poubelles de l’histoire au prétexte que, depuis 1914, l’identité du mode de production capitaliste avait changé, avaient volé en éclats.

 

Dans le même temps, ledit « mouvement communiste » ou ce qu’il restait du milieu ultra-gauche était, faute de moyens théoriques, incapable de comprendre les phénomènes historiques qui se déroulaient sous ses yeux. Ne parlons même pas de l’accumulation du capital qui fut la plus forte de l’histoire en pleine période de soi-disant « décadence » du capitalisme. Tandis que l’affirmation toujours plus franche des crises périodiques de surproduction venait confirmer de manière éclatante la théorie de Marx, et, alors que la question nationale avait été déclarée forclose en Europe, la réunification allemande, la guerre des Balkans, le délitement de l’Urss accompagné de la résurgence d’anciennes nations (pays baltes par exemple), la création de nouvelles qui n’avaient jamais existé (Slovénie, par exemple,) offraient des événements non intégrables dans le cadre théorique étriqué et inadapté qui formait la vulgate de l’ultra-gauche. Pire, tous ces événements avaient lieu sous l’égide de la démocratie bourgeoise qui montrait par là sa grande vitalité. Après la chute du mur de Berlin, les doutes accumulés à l’issue des recherches et qui condamnaient l’idéologie ultra-gauche recevaient un puissant secours du mouvement réel.

 

Nous posâmes alors les prémisses d’un travail important, qui n’a pas encore été intégralement publié, mais qui devrait l’être à la fin de l’année 2016, sur le concept de révolution permanente chez Marx. Il montrait que la république démocratique est l’ultime et nécessaire champ de bataille pour que le combat du prolétariat puisse être mené jusqu’à son terme, le seul terrain où il peut affronter la bourgeoisie dans son ensemble puisque la république démocratique est justement le régime qui permet à l’ensemble de la bourgeoisie de gouverner. D’autre part, la capacité de cette dernière à faire évoluer la société ne s’arrête pas si ce n’est dans les circonstances les plus critiques de son existence et même dans ces circonstances, elle agitera toujours des perspectives y compris les plus mensongères ; le seul coup d’arrêt possible étant celui de la révolution prolétarienne, la révolution communiste[13].

 

Tous ces éléments cumulés nous firent considérer que l’épisode « Communisme ou Civilisation » était accompli et que se marquait la fin d’un cycle[14]. Nous avions effectué notre retour à Marx, la puissance de tout l’arsenal théorique du marxisme nous était ouvert, débarrassé de ses scories et nous pouvions donc en repartir, pour d’une part poursuivre les travaux qui avaient été entamés depuis quatorze ans (surtout ceux sur la crise), et d’autre part, repartir sur les autres thématiques, les verrous liés à la contradiction entre positions politiques et fondements théoriques ayant sauté.

 

En même temps, notre analyse de la conjoncture historique comme de l’évolution du marché mondial nous amenait à conclure qu’il s’écoulerait encore des dizaines d’années avant que ne s’ouvre un nouveau cours favorable à la mobilisation politique du prolétariat. Nous estimions que, dans cette phase d’expansion et de reconfiguration du mode de production capitaliste, 30 ou 40 ans au moins seraient encore nécessaires pour que se posent des échéances de cette nature.

 

Nous décidâmes donc d’arrêter la revue Communisme ou Civilisation, et de nous consacrer à l’édition d’ouvrages de fond, qui seraient destinés à mieux perdurer que des publications par série dans une revue. Nous abandonnions donc la forme revue pour celle des livres, signe d’un repli en attente d’une nouvelle phase dans la période de contre révolution. Parallèlement, comme cette époque a aussi été celle de l’Internet et que cet événement a bouleversé la donne en matière de diffusion, d’édition numérique, etc., cela nous amena également à nous doter des avantages que donnaient ces nouveaux médias.

Le pseudonyme collectif qui fut choisi : Robin Goodfellow, le fut en référence à Marx qui désignait ainsi la « vieille taupe », celle qui sait si bien creuser sous la terre : la révolution[15].

 

C’est donc sous cette identité que nous publions, depuis 1998, des contributions théoriques sur les thématiques cruciales auxquelles fait face le mouvement prolétarien et au sujet desquelles, tout ou presque, est à reconstruire, tant les générations de révolutionnaires qui se sont succédées depuis les années 1930 ont fait défaut, sur ce plan, nonobstant leur  courage, leur opiniâtreté et leur constance politique au cours de ces 90 « années obscures ». Non seulement le point de restauration de la théorie vivante de Marx et Engels n’a pas été atteint, non seulement le bilan approfondi de la vague révolutionnaire des années 1920 et la défaite qui s’en est suivie n’a pas réellement été tiré, mais de plus, toute l’histoire du vingtième siècle et de tous ses développements, économiques, politiques, technologiques, scientifiques… manque cruellement de l’analyse révolutionnaire. La tâche est immense, et bien peu nombreux sont ceux qui ont l’énergie pour s’y atteler et la boussole pour s’orienter.

 

Désormais sans organe de presse régulier, Robin Goodfellow utilise un site web (www.robingoodfellow.info), plus récemment un blog (defensedumarxisme.wordpress.com) en plusieurs langues, ainsi que les canaux des réseaux dits « sociaux » pour informer de ses parutions. Contrairement à la première époque, notre réappropriation de la théorie scientifique du socialisme révolutionnaire nous a permis, au cours des quinze dernières années, d’analyser et de commenter plus concrètement des situations politiques et économiques actuelles (les « printemps arabes » par exemple ou les mouvements de lutte – CPE, retraites, loi travail… , en France- ou ailleurs – situation politique au Brésil -, Grève des sous-traitants de Telefonica en Espagne), encore une fois à la mesure de nos faibles moyens et sachant que l’émission d’opinions à l’emporte-pièce (comme dans les « débats » des réseaux sociaux) n’apporte rien d’autre que de la perte de temps. Fonder une analyse d’événements, qui sont aujourd’hui définitivement mondiaux et donc entremêlant des histoires locales et générales très complexes, sur autre chose que sur une étude approfondie et sérieuse des contextes reviendrait à faire ce que nous avons toujours reproché à nos adversaires du « milieu révolutionnaire » : pérorer, à partir de concepts erronés et d’une reprise a-critique des informations de la presse bourgeoise. Nous avons cessé de faire de ce milieu une cible prioritaire de la critique en pensant que ce que nous partagions pouvait servir de terreau pour une évolution de ces camarades vers plus de rigueur dans la défense de la théorie révolutionnaire. Pour l’essentiel, tous les groupes de la gauche communiste ont été réduits à néant, et les quelques rares individus lucides restant qui, effectivement, se détachent de la vulgate passée ne le font pas toujours dans la perspective d’une défense intransigeante des fondements du socialisme scientifique. Même en maintenant au plus haut le flambeau de la révolution passée – ce que ne firent pas, par exemple, les trotskystes, éternels ralliés à la gauche bourgeoise –, ces courants furent impuissants à maintenir et développer le socialisme scientifique.

 

Nul ne sait comment, dès lors que le fil de la transmission générationnelle a été quasiment rompu, se redéveloppera la conscience révolutionnaire appuyée sur une appréhension scientifique de la critique du mode de production capitaliste. Nul ne sait quand le communisme, clairement identifié comme une société sans classes, sans rapports marchands, sans argent et sans état redeviendra un objectif affiché de millions de combattants prolétariens à travers le monde entier. Nul ne sait si la frange de la jeunesse qui oscille entre condition prolétaire et intégration dans les classes moyennes sera capable de se mobiliser face au sort qui lui est fait. Nul ne sait quand les contradictions inter-impérialistes qui s’aiguisent déboucheront sur un conflit armé majeur, troisième guerre mondiale et si le prolétariat international sera capable de l’arrêter.

 

En revanche nous savons, avec la certitude la plus absolue, que le mode de production capitaliste n’a pas gagné son éternité sur terre, éternité qui marquerait la « fin de l’histoire ». Nous savons que le mode de production capitaliste connaît des crises de surproduction périodiques et que la prochaine dont l’ampleur sera vraisemblablement importante devrait intervenir sous peu. Nous savons que ce mode de production est grevé d’une contradiction mortelle dans son mode même d’existence, contradiction qui se traduit par le phénomène valorisation/dévalorisation. Nous savons qu’en continuant de développer la productivité du travail de manière illimitée, il sape les bases mêmes de son existence. Nous savons qu’il développe ainsi, au-delà même de ce qui est nécessaire, les bases du communisme, et que celui-ci est potentiellement en actes, déjà présent dans les tréfonds de la société, ne demandant pour accoucher que la secousse violente de la révolution communiste qui le libérera.

 

Nous savons aussi que cette révolution échouera si, d’ici là, le prolétariat mondial ne s’est pas organisé en parti politique distinct, opposé à tous les partis existants, en parti communiste qui devra se constituer, d’emblée, à l’échelle internationale. Nous savons que la révolution échouera si le prolétariat, organisé en parti politique n’est pas capable de s’emparer du pouvoir politique et d’exercer le pouvoir de « l’immense majorité » (Lénine) sur la minorité exploiteuse. Nous savons que la phase de transition politique entre la société bourgeoise et la société communiste devra prendre la forme de la dictature du prolétariat, qui signifie l’imposition par la force, aux actuelles classes dominantes et à leurs alliés, de mesures destinées à briser leur Etat et leur pouvoir économique et à enclencher un mouvement irréversible de rupture avec la logique marchande et la logique de la production capitaliste. Nous savons, plus que jamais, qu’il faudra que le prolétariat résolve la question militaire. Désarmé plus ou moins systématiquement par la bourgeoisie, désarmé par l’instillation du pacifisme, il devra faire face à une bourgeoisie mondiale qui sera prête à tout pour défendre son système d’exploitation, mais qui sera en même temps atteinte au cœur devant l’évidence de sa faillite comme classe dirigeante de la société. La force du prolétariat repose sur son nombre ; il est devenu la grande majorité de la population active dans les pays capitalistes les plus développés et il devra rallier à lui les classes moyennes anciennes ou modernes pour l’emporter contre une bourgeoisie aux abois.

 

Alors ?

Alors on continue !

 

Robin Goodfellow – Novembre 2016

 



[1] Tous ces textes sont disponibles sur notre site www.robingoodfellow.info, rubrique « Archives ».

[2] C’est notamment parce qu’il constatait, qu’à la différence des groupes gauchistes, il n’avait pas vu ses effectifs croître fortement que « Pouvoir ouvrier », héritier marxiste de « Socialisme ou Barbarie », mis un terme à son existence.

[3] Rappelons que le terme, qui a acquis depuis un nouveau sens médiatique, désigne, à la « gauche » de l’extrême-gauche (pour autant que ces mots aient eux même un sens), les héritiers des courants d’opposition de la III° Internationale : gauches dites germano-hollandaise et italienne, notamment, malgré tout ce qui les séparait.

[4] Quasiment jusqu’à la fin. Le retard pris dans la publication du n°13 de la RIMC, puis du n°14, le dernier, témoignait de la crise vécue dans la continuité de l’approche théorique fondatrice de CouC, et de la nécessité d’accoucher d’une autre perspective.

[5] Les fondements de cette décadence faisant l’objet d’analyses opposées, l’une d’inspiration luxemburgiste, l’autre insistant sur une baisse du taux de profit inspirée des théories de Grossmann-Mattick.

[6] Invariance théorisait la domination formelle et la domination réelle du capital

[7] Le « chapitre inédit », parut en 1971 aux éditions 10/18, Maximilien Rubel en proposa une autre traduction dans l’édition, en 1972 du volume 2 des « Œuvres » de Marx dans la Pléiade, sous le titre « Matériaux pour l’économie 1861-1865 » (pages 361 à 498)

[8] Dans le n°1 de CouC nous rejetions  le terme  « marxisme » sur la base d’une compréhension erronée de la fameuse phrase de Marx « En tous les cas, moi, je ne suis pas marxiste !». Marx visait là les nouveaux venus lettrés (avocats, professeurs, journalistes…) qui rejoignaient les rangs de la social-démocratie allemande dans les années 1860 et se proclamaient « marxistes » sans avoir rien compris à la théorie.

[9] La critique de Grossmann Mattick et par la force des choses, les travaux sur la subordination formelle et la subordination réelle du travail au capital participaient du même mouvement.

[10] Editable sur www.lulu.com ou disponible en Pdf sur notre site : www.robingoodfellow.info

[11] L’Harmattan.

[12] Courant communiste international, publiant notamment la « Revue internationale » et des journaux en plusieurs langues (fr.internationalism.org)

[13] Une première approche de ces questions est abordée dans notre texte de 2011 : « Le cours historique de la révolution prolétarienne »

[14] « La fin d’un cycle » est le titre du texte que nous fîmes paraître dans le dernier numéro de la RIMC. Une partie des camarades, qui n’acceptaient pas cette analyse, refusèrent de nous suivre dans cette reconformation du travail de restauration théorique.

[15] "Ces hommes nouveaux, ce sont les ouvriers. Ils sont l'invention des Temps modernes, autant que le sont les machines. Aux signes qui déconcertent la bourgeoisie, l'aristocratie, et les piètres prophètes de malheur, nous reconnaissons notre brave ami Robin Goodfellow, la vieille taupe qui sait si vite travailler sous la terre, le digne pionnier - la révolution." (Karl Marx. Allocution pour le 4ème anniversaire du journal chartiste : "People's Paper "1856.)